Éditorial
« T’as qu’à venir à la biennale cet été », qu’il m’avait fait le pote, quand j’ai dit que je verrais bien le retour du son dans Saxifrage. La biennale de Saxifrage, ça sonnait comme une obscure réunion de botanistes gauchistes dans ma caboche. La genre de cérémonie où on t’invite si t’en es déjà. En fait, pas du tout : juste un repas à l’ombre de quelques arbres, genre apéro dînatoire amélioré, où se côtoient melons bio locaux et bières blondes industrielles. De l’auberge espagnole avec son lot de tartes maison, du pif à boire sans y mettre le nez pour regarder sous sa robe et les plateaux de charcuterie et de fromage servis indifféremment, des fois que si tu veux tartiner l’un sur l’autre, on voit pas le mal. Et avec tout ça, va faire une réunion de travail, repenser la maquette du journal, avoir un avis argumenté sur la pertinence d’un code barre, juger du juste équilibre d’articles d'enquête et d’articles d’opinion, tirer l’iconographie, veiller aux finances pour avoir de quoi publier le suivant et régler les envois postaux, et même trouver le temps de débattre sur la répartition des rôles au sein de la rédaction.
La méthode a l’air rodée, le rétroplanning pour caler les lectures collectives, les toilettages, les corrections, le chemin de fer et le maquettage… un poil jargonnant quand t’es pas du milieu, mais pas sectaire pour autant. Y a des moments, entre deux verres, tu sais plus si on parle canard associatif ou projet de vie en communauté. En tout cas, y a pas de chef, pas de gourou, même si tu sens que certains sont plus égaux que d’autres. Le privilège de l’âge, ou de l’expérience sans doute. Mais c’est pas interdit de leur voler dans les plumes, donc ça permet quelques audaces. Après cette biennale estivale aux accents de Provence, me voilà embrigadé dans une ribambelle de réunions Saxipouet (je les appelle comme ça pour désacraliser le bousin).
Alors, qu’est-ce qu’on y met, dans le journal de rentrée ? Le conte de Carmaux ? OK, mais avec de la mise en page, que ça claque. La brève sur le tungstène, parce que ça fait plaisir de pas toujours perdre. L’appel à contribution, vu qu’on le répète, on n’est pas sectaires (mais y a des conditions, y a pas écrit « courrier des lecteurs » non plus !). Le point tragique mais pas méchant sur la MJC d’Albi, ça serait bien que ça fasse réfléchir deux ou trois éduc popiens. Les déchets, trucs de ouf ! L’entretien sur le téléphone, allô non mais allô quoi… de la balle ! La contribution sur le vote ? Mouais mais ça demanderait affinage, faudrait en causer avec l’auteur, prochain numéro ? Pas d’inspiration assez unanime pour l’hypoténuse cette fois, si vous avez des idées on prend. Et pis, mon petit appendice à un podcast, un son que j’ai proposé via Radio Albigés, avec ce texte, là tout à côté, qui brosse le contexte. « Avec l’édito et ton article en première page, t’as la une pour toi du coup », me fait un vieux de la vieille dans l’équipe. « Faut pas te foirer, faut faire dans un truc qui introduise sans être chiant, quoi. » OK, je vais essayer. « Et évite de parler en je », qu’il me fait.
Ah ben merde alors !